La Corogne, où nous sommes arrivés de Bretagne, nous a fait au final un effet assez paradoxal. Une immense plage, un vieux port entouré de vieux immeubles aux immenses baies vitrées d’un blanc éclatant, le plus vieux phare du monde en activité, une vieille ville faite de ruelles et de placettes, la Corogne a tout pour plaire. Mais ce n’est pas vraiment ce que nous sommes venus chercher. C’est une grande ville, et l’exotisme n’est pas tout à fait au rendez vous. Alors certes, nous faisons quelques balades agréables à vélo, nous nous posons dans les bars locaux pour déguster des tapas, mais c’est comme si le voyage n’avait pas commencé pour de bon. Nous rêvons de rias, de forêts et de petits villages perdus.
Nous partons donc, direction Laxe, le premier ria sur la côte en allant vers le Sud. Nous mouillons au crépuscule au milieu d’une grande plage ; l’unique voilier avec qui nous la partageons partira au petit matin. Là encore, l’impression est en demi teinte. Laxe, c’est un centre ville médiéval très joli, et un front de mer d’immeubles modernes sans saveur. On se balade, on croise un chat (Sarah était en manque), on marche les pieds dans le sable, on s’apitoie sur deux goélands blessés qui tournent tristement en rond, une aile traînant dans le sable… malheureusement nous ne pouvons rien pour eux. C’est la première fois que nous mouillons de nuit seuls dans un mouillage inconnu, et c’est en soi un petit événement, mais nous n’avons pas encore trouvé ce que nous sommes venus chercher en Galice.
Nous nous remettons en route le lendemain, direction le ria de Camarinas, dernière étape avant de passer le cap Finisterre. Nous avons prévu de mouiller à l’entrée d’une rivière, au milieu des forêts, dans un des endroits les plus préservés de la côte, mais nous sommes accueillis par un épais brouillard. Soudain, nous voyons surgir un zodiak à moins de 50m, venu de nulle part : on n’y voit vraiment rien, et on klaxonne toutes les minutes, dans le doute. Le GPS nous indique une côte toute proche, mais nous ne devinons rien à travers le manteau blanc de brume qui nous entoure. Nous nous réfugions au port de Camarinas, ou nous avions passé une nuit lors de notre remontée vers la Bretagne en mai dernier. Le mouillage paradisiaque, ce sera pour plus tard. Pour l’instant, nous nous réjouissons d’avoir retrouvé la sécurité du port.
Le soleil se lève, et emporte avec lui l’épais nuage qui flottait à hauteur d’yeux. Cette fois, c’est la bonne. Nous voyons distinctement l’embouchure de la rivière sur laquelle nous avons jeté notre dévolu, elle n’est qu’a quelques encablures. Nous larguons donc les amarres qui nous rattachaient au port et les remplaçons dix minutes plus loin par 30m de chaîne de 10 et notre ancre massive. Il y a des grands arbres partout, on se croirait au Canada. L’eau est a 17°, pas question de se baigner sans combinaison malheureusement. C’est donc intégralement vêtu de noir que je vais débarrasser Lucy des quelques algues qu’elle traîne dans ses safrans, son hélice et son speedo.
Il semble qu’il y ait une petite ville que l’on peut atteindre en remontant 2 miles en annexe sur la rivière. L’eau n’est pas assez profonde pour Lucy, et nous l’abandonnons pour quelques heures. Nous ne sommes qu’a une cinquantaine de mètres de la berge et de ses rochers, pourvu que notre ancre ne nous fasse pas de blague pendant notre absence. C’est aussi l’occasion d’étrenner notre nouveau moteur d’annexe de 6cv qui a remplacé le vieux honda de 4cv qui toussait beaucoup. Avec un moteur suffisamment puissant et une annexe de qualité, on peut en théorie planner, c’est à dire faire décoller l’annexe qui ne se retrouve plus en contact avec l’eau que sur 10% de sa surface. Ca ne marche pas, et nous sommes assez déçus, jusqu’à ce que je remarque que nos roues traînent dans l’eau. Forcément, avec le vieux moteur, ca ne faisait aucune différence, mais avec le nouveau …. Nous voilons donc lancés à toute vitesse sur une eau presque plate. Il nous faudra moins de dix minutes pour arriver à Rio del Puente
L’endroit est charmant. Un vieux pont de pierre, des maisons qui ont vu passer pas mal de générations de galiciens et bien peu de touristes, nous ne sommes pas déçus. La forêt entoure la ville, nous croisons un âne dans un champ, et de drôles de constructions de pierre sur pilotis. La tortilla que nous dégustons sur la plage du village est délicieuse, et c’est tout souriants que nous regagnons Lucy sous un soleil couchant. Le spectacle est incroyable. Nous sommes seuls, la rivière est encadrée de pins immenses, surplombés par des collines sur lesquelles se découpent au loin des montagnes. Les ombres sont démesurées, et le tableau est presque irréel. Sarah pilote notre annexe entre les algues à une vitesse folle et nous rions comme des enfants sans raison. Cette fois c’est sûr, nous avons trouvé ce que nous étions venus chercher.
Elle est belle Lucy sur la rivière !
J’ai trouvé un commentaire sur ces drôles de constructions :
« Les «hórreos», greniers à grains sur pilotis, sont répandus dans le Nord de l’Espagne, et spécialement en Asturies et en Galice, avec des variations architecturales (plan, toiture, nombre de pilotis…), et dans le matériau utilisé : plutôt en bois pour les Asturies, plutôt en pierre en Galice. Une de leurs spécificités est la pierre plate (carrée ou circulaire) et débordante en haut des piliers, et qui empêche les rongeurs d’avoir accès aux grains.
On peut les rapprocher des «espigueiros» portugais. »
A bientôt.
Bisous les chéris
Super ! Merci pour les explications !